Il y a quelques temps (post du 18 août) , je faisais le parallèle avec l'état d'esprit de 1921: au sortir d'une crise rude, peu de mesures furent réellement prises pour en prévenir le retour. Mais avec la dette grecque, on est carrément transporté dans les années 20. Les Etats sont surendettés, non pas d'avoir à assumer le poids terrible de quatre années de guerre et d'inflation, mais d'un transfert massif de la dette privée dans leur compte. Il est d'ailleurs curieux de noter que les gouvernements européens sont aujourd'hui dans la position des gouvernements des pays d'Amérique Latine d'il y a 20 ans - soyons un tout petit peu patient et nous allons bientôt entendre parler du Mur de l'Argent ("the banker's ramp", disent les Anglais). L'instabilité financière, la phase maniaco-depressive de l'économie va donc se poursuivre, en attendant une résolution de la Crise - espérons seulement qu'il ne s'agisse pas d'un nouveau 29. Mais l'alternative n'est guère encourageante, sur un autre plan:la rachat de notre dette, de nos actifs et donc de notre économie par les économies excédentaires, à commencer par la chinoise.
Dans 20 ans, notre capital sera chinois, notre travail appartiendra à un tiers monde local ou extraterritorial. Que deviendrons alors les corps intermédiaires?
samedi 30 janvier 2010
mercredi 27 janvier 2010
Invictus
Ce n'est certes pas le propos des Notes du Déluge de se transformer en critique de cinéma. Mais je ne résiste pas à parler d'Invictus, le film de Clint Eastwood. Je n'aurais pas pu en effet rêver plus belle illustration du point que je tentais de faire dans mon post du 19 Novembre. Un leader peut changer les choses, faire bouger les gens et non se contenter de les suivre. Qu'il utilise un grand événement sportif dans ce dessein me semble plus qu'une coïncidence, en démocratie.
dimanche 24 janvier 2010
Identité Nationale (2): Ariane, comme t'y es belle!
Certains avaient trouvé mon post sur Love Actually un peu léger. L'humeur festive qui le nourrissait aurait du m'épargner cette critique, pas complètement injustifiée il est vrai. J'ai peur de tomber à nouveau sous le coup des censeurs en proposant une deuxième réponse au délicat problème de l'identité nationale - un peu plus sérieuse, en attendant mieux (on y travaille!).
C'est évident à y réfléchir un peu plus, la culture qui rassemble le mieux les Français ces temps-ci, c'est la culture séfarade. Qui ne se reconnaît pas dans le charme blagueur de Gad Elmaleh? Qui n'a pas adopté, peu ou prou, les tics de la Vérité, si je mens? Neuilly-sud ("saint-james") est notre Kensington, le 16ème notre Notting Hill.
Beaucoup plus à l'aise avec le monde arabe que les mentalités "vieille France" ou les élites ashkénazes, elle opère comme un trait d'union entre les différentes immigrations. Dans ces aspects les plus superficiels, consuméristes voire folkloriques, dans son humour, elle forge une nouvelle synthèse qui plaît et convient bien à un pays en plein basculement vers le Sud entre les racines des deuxièmes ou troisièmes générations d'immigrés d'Afrique du Nord et l'héliotropisme de ses retraités éduqués par le Club Med d'Agadir migrant en masse vers les pavillons du Roussillon. Mais si l'on tend un peu plus l'oreille, on peut également entendre l'écho de la grande musique tolédane du 12ème siècle, au carrefour des 3 cultures, bref moment d'échange et d'harmonie. Nous aussi, nous devons sans doute protéger Maïmonide, Averroes et Thomas d'Aquin contre les assauts almohades ou l'enthousiasme vite inquisiteur du Cid.
La France a du mal à regarder son immigration en face, à la différence du New Labour, qui en avait fait un élément clé de sa synthèse: multiculturalisme, emploi et sécurité dans une Cool Britannia reconnaissant pour la première fois d'autres accents que celui de la reine à la BBC. Elle a du mal à en débattre -elle à du mal à débattre de quoi que ce soit, ces temps-ci.
Cette nouvelle synthèse est pourtant inévitable car l'immigration en tant que fusion des peuples est inéluctable, la créolisation une donnée permanente de l'histoire. Notre créolisation, c'est avec l'Afrique du Nord (et peut etre l'Afrique tout court) qu'elle va s'opérer. La culture séfarade nous en donne un aperçu, un avant-goût. Et ce n'est pas par hasard que le première petit-fils de Sarkozy s'appelle Solal!
C'est évident à y réfléchir un peu plus, la culture qui rassemble le mieux les Français ces temps-ci, c'est la culture séfarade. Qui ne se reconnaît pas dans le charme blagueur de Gad Elmaleh? Qui n'a pas adopté, peu ou prou, les tics de la Vérité, si je mens? Neuilly-sud ("saint-james") est notre Kensington, le 16ème notre Notting Hill.
Beaucoup plus à l'aise avec le monde arabe que les mentalités "vieille France" ou les élites ashkénazes, elle opère comme un trait d'union entre les différentes immigrations. Dans ces aspects les plus superficiels, consuméristes voire folkloriques, dans son humour, elle forge une nouvelle synthèse qui plaît et convient bien à un pays en plein basculement vers le Sud entre les racines des deuxièmes ou troisièmes générations d'immigrés d'Afrique du Nord et l'héliotropisme de ses retraités éduqués par le Club Med d'Agadir migrant en masse vers les pavillons du Roussillon. Mais si l'on tend un peu plus l'oreille, on peut également entendre l'écho de la grande musique tolédane du 12ème siècle, au carrefour des 3 cultures, bref moment d'échange et d'harmonie. Nous aussi, nous devons sans doute protéger Maïmonide, Averroes et Thomas d'Aquin contre les assauts almohades ou l'enthousiasme vite inquisiteur du Cid.
La France a du mal à regarder son immigration en face, à la différence du New Labour, qui en avait fait un élément clé de sa synthèse: multiculturalisme, emploi et sécurité dans une Cool Britannia reconnaissant pour la première fois d'autres accents que celui de la reine à la BBC. Elle a du mal à en débattre -elle à du mal à débattre de quoi que ce soit, ces temps-ci.
Cette nouvelle synthèse est pourtant inévitable car l'immigration en tant que fusion des peuples est inéluctable, la créolisation une donnée permanente de l'histoire. Notre créolisation, c'est avec l'Afrique du Nord (et peut etre l'Afrique tout court) qu'elle va s'opérer. La culture séfarade nous en donne un aperçu, un avant-goût. Et ce n'est pas par hasard que le première petit-fils de Sarkozy s'appelle Solal!
samedi 23 janvier 2010
Bonjour M Rueff
Je pensais que le nom et la pensée de Jacques Rueff avaient disparu dans l'empyrée des économistes libéraux, quelque part au dessus du Léman, en priant pour que le grand retour au keynésianisme ne trouble sa tranquillité. Mais de récentes réflexions sur le lien entre changes flottants et prix des actifs semblent réveiller ses mânes.
L'argument est le suivant: une fois la contrainte d'un stock d'or forcement limité sur les finances publiques, les deficits exterieurs n'ont plus de correctifs et nourrissent le développement de bulle via l'explosion de la monnaie et du crédit. Deux chiffres: les balances extérieures monétaires se sont accrues de 55% durant les 30 Glorieuses - et de 2000% depuis!
Pris au pied de lettre, le raisonnement est un peu court. Caricaturé, il revient à dire que si l'économie ne s'était pas développée, globalisée, elle ne se serait pas financiarisée dans les mêmes proportions, donnant naissance à des bulles spéculatives ridiculisant par leur ampleur la faillite de Law.
Mais on peut lire les choses autrement: mon cher Buttonwood conclut son blog par ces mots très Rueffiens: "too often over the last 40 years our answer has been to create new claim on wealth than wealth itself". http://www.economist.com/blogs/buttonwood/2010/01/ruffer_view. On n'est pas très loin des "faux droits" de M. Rueff.
Ce que ne pouvait imaginer le respectable académicien, c'est que les ménages du monde occidental se prendraient pour des SIMS: on se fixe un budget illimité (ou pas de budget) et on se construit la maison de ses rêves... Finalement, ce à quoi nous faisons face, c'est le début de résorption du décalage entre nos rêves et la réalité. Plus précisément, entre nos désirs de consommation et de possession, par définition éternellement inassouvis, et la réalité plus modeste de la hausse de la productivité (on n'ose plus parler de richesse réelle). La désepargne, l'endettement, l'inflation pyramidal des actifs avaient compensé pendant 20 ans. Cette époque est finie - mais le rêve n'est pas mort, et je ne serais pas surpris de voir resurgir toutes tentatives pour le ranimer.
L'argument est le suivant: une fois la contrainte d'un stock d'or forcement limité sur les finances publiques, les deficits exterieurs n'ont plus de correctifs et nourrissent le développement de bulle via l'explosion de la monnaie et du crédit. Deux chiffres: les balances extérieures monétaires se sont accrues de 55% durant les 30 Glorieuses - et de 2000% depuis!
Pris au pied de lettre, le raisonnement est un peu court. Caricaturé, il revient à dire que si l'économie ne s'était pas développée, globalisée, elle ne se serait pas financiarisée dans les mêmes proportions, donnant naissance à des bulles spéculatives ridiculisant par leur ampleur la faillite de Law.
Mais on peut lire les choses autrement: mon cher Buttonwood conclut son blog par ces mots très Rueffiens: "too often over the last 40 years our answer has been to create new claim on wealth than wealth itself". http://www.economist.com/blogs/buttonwood/2010/01/ruffer_view. On n'est pas très loin des "faux droits" de M. Rueff.
Ce que ne pouvait imaginer le respectable académicien, c'est que les ménages du monde occidental se prendraient pour des SIMS: on se fixe un budget illimité (ou pas de budget) et on se construit la maison de ses rêves... Finalement, ce à quoi nous faisons face, c'est le début de résorption du décalage entre nos rêves et la réalité. Plus précisément, entre nos désirs de consommation et de possession, par définition éternellement inassouvis, et la réalité plus modeste de la hausse de la productivité (on n'ose plus parler de richesse réelle). La désepargne, l'endettement, l'inflation pyramidal des actifs avaient compensé pendant 20 ans. Cette époque est finie - mais le rêve n'est pas mort, et je ne serais pas surpris de voir resurgir toutes tentatives pour le ranimer.
vendredi 8 janvier 2010
Saint Vincent, François, Paul et les autres
On croise de temps à autre des Bixente, des Elen, des Herrick, en se disant que le ridicule ne tue pas. Puis on évoque l'immortel génie de Claire Bretécher, peuplant ses bandes de Bergère, de Myrtil et autres Modern.
C'est l'erreur typique de perspective du réac de base. Tout a toujours été moderne, en rupture. Les ancêtres des nos ducs portaient et portent encore des prénoms issus du francique, de l'ancien germain. Même nos saints ont des prénoms peu catholiques: pour un Paul, parlons de François ("le petit français", certes baptisé Giovanni), de Vincent, le "victorieux" etc.
Tout çà est très loin du parler de Canaan des puritains genevois ou anglo-saxons qui verra refleurir les Abraham et les Noah.
Ces saints ont créé des lignées, des traditions - qui nous semblent aujourd'hui le comble du classicisme tant le temps recouvre toutes les aspérités. Ils ont créé des ordres, dans un esprit de rupture, de conflit et d'innovation. François fuit Assise, rompt avec l'ordre établi pour créé un nouvel ordre (on pense à E.Mounier, s'insurgeant contre le désordre établi), insatisfait par l'évolution de l'ordre institué par Bernard ("brave comme l'ours" en francien). Après deux siècles, ses fratelli seront synonymes de corruption et de dévoiement de l'Eglise et Ignace s'insurgera à son tour.
Il est d'ailleurs remarquable que ces grands saints en ont appelé aux papes contre leur hiérarchie immédiate, temporelle et spirituelle, pour accomplir leur réforme. Ce sont des Innocents, des Calixtes (né Guy ou Gui, encore un prénom germanique), des Grégoires (nés Alexandre, tout çela est bien grec!) et même un Paul (mais né Alexandre) qui les ont soutenus.
Toute petite leçon de ce parcours onomastique: gardons nous d'un conservatisme de premier niveau. Il faut bousculer l'ordre établi pour en créer un nouveau. Reste à savoir qui doit s'en charger. Le danger vient de ceux qui pensent que le nouvel ordre est prévisible. La destruction de l'ordre crée le désordre, c'est à dire la vie, jaillissante, autonome, imprévisible. L'action humaine, qu'elle soit individuelle ou collective (étatique) crée l'inconnu - ce qui est fort réjouissant, tout compte fait.
C'est l'erreur typique de perspective du réac de base. Tout a toujours été moderne, en rupture. Les ancêtres des nos ducs portaient et portent encore des prénoms issus du francique, de l'ancien germain. Même nos saints ont des prénoms peu catholiques: pour un Paul, parlons de François ("le petit français", certes baptisé Giovanni), de Vincent, le "victorieux" etc.
Tout çà est très loin du parler de Canaan des puritains genevois ou anglo-saxons qui verra refleurir les Abraham et les Noah.
Ces saints ont créé des lignées, des traditions - qui nous semblent aujourd'hui le comble du classicisme tant le temps recouvre toutes les aspérités. Ils ont créé des ordres, dans un esprit de rupture, de conflit et d'innovation. François fuit Assise, rompt avec l'ordre établi pour créé un nouvel ordre (on pense à E.Mounier, s'insurgeant contre le désordre établi), insatisfait par l'évolution de l'ordre institué par Bernard ("brave comme l'ours" en francien). Après deux siècles, ses fratelli seront synonymes de corruption et de dévoiement de l'Eglise et Ignace s'insurgera à son tour.
Il est d'ailleurs remarquable que ces grands saints en ont appelé aux papes contre leur hiérarchie immédiate, temporelle et spirituelle, pour accomplir leur réforme. Ce sont des Innocents, des Calixtes (né Guy ou Gui, encore un prénom germanique), des Grégoires (nés Alexandre, tout çela est bien grec!) et même un Paul (mais né Alexandre) qui les ont soutenus.
Toute petite leçon de ce parcours onomastique: gardons nous d'un conservatisme de premier niveau. Il faut bousculer l'ordre établi pour en créer un nouveau. Reste à savoir qui doit s'en charger. Le danger vient de ceux qui pensent que le nouvel ordre est prévisible. La destruction de l'ordre crée le désordre, c'est à dire la vie, jaillissante, autonome, imprévisible. L'action humaine, qu'elle soit individuelle ou collective (étatique) crée l'inconnu - ce qui est fort réjouissant, tout compte fait.
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