samedi 23 janvier 2010

Bonjour M Rueff

Je pensais que le nom et la pensée de Jacques Rueff avaient disparu dans l'empyrée des économistes libéraux, quelque part au dessus du Léman, en priant pour que le grand retour au keynésianisme ne trouble sa tranquillité. Mais de récentes réflexions sur le lien entre changes flottants et prix des actifs semblent réveiller ses mânes.

L'argument est le suivant: une fois la contrainte d'un stock d'or forcement limité sur les finances publiques, les deficits exterieurs n'ont plus de correctifs et nourrissent le développement de bulle via l'explosion de la monnaie et du crédit. Deux chiffres: les balances extérieures monétaires se sont accrues de 55% durant les 30 Glorieuses - et de 2000% depuis!
Pris au pied de lettre, le raisonnement est un peu court. Caricaturé, il revient à dire que si l'économie ne s'était pas développée, globalisée, elle ne se serait pas financiarisée dans les mêmes proportions, donnant naissance à des bulles spéculatives ridiculisant par leur ampleur la faillite de Law.
Mais on peut lire les choses autrement: mon cher Buttonwood conclut son blog par ces mots très Rueffiens: "too often over the last 40 years our answer has been to create new claim on wealth than wealth itself". http://www.economist.com/blogs/buttonwood/2010/01/ruffer_view. On n'est pas très loin des "faux droits" de M. Rueff.

Ce que ne pouvait imaginer le respectable académicien, c'est que les ménages du monde occidental se prendraient pour des SIMS: on se fixe un budget illimité (ou pas de budget) et on se construit la maison de ses rêves... Finalement, ce à quoi nous faisons face, c'est le début de résorption du décalage entre nos rêves et la réalité. Plus précisément, entre nos désirs de consommation et de possession, par définition éternellement inassouvis, et la réalité plus modeste de la hausse de la productivité (on n'ose plus parler de richesse réelle). La désepargne, l'endettement, l'inflation pyramidal des actifs avaient compensé pendant 20 ans. Cette époque est finie - mais le rêve n'est pas mort, et je ne serais pas surpris de voir resurgir toutes tentatives pour le ranimer.

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